Poser des limites claires et responsabilisantes
Depuis que nous sommes petits, nous sommes confrontés à la notion de limite. Les limites du monde extérieur et nos propres limites intérieures. Il existe diverses sortes de limites : corporelles, temporelles, spatiales, morales.
Il est intéressant de voir qu’à l’adolescence, même si elles sont remaniées, les limites sont véritablement au centre des préoccupations de l’adolescent. « Il repousse toujours la limite » ou « Il cherche toujours la limite », entend-on souvent dire par les parents ou les professeurs. La limite sert à se situer par rapport au monde environnant ; elle est un point de repère qui nous rappelle que nous ne sommes pas tout-puissants et que nous ne pouvons pas tout avoir ni tout nous permettre.
La limite interne est une limite que nous avons en nous-mêmes. Le petit enfant expérimente vite la limite de son propre corps, par exemple lorsqu’il est confronté à son manque de motricité ou de coordination, il éprouve la frustration de ne pas pouvoir marcher, puis de ne pas pouvoir accéder à tout ce qu’il veut. L’acceptation des limites va de pair avec l’acceptation d’une certaine frustration.
Lorsque l’enfant ne peut avoir ce qu’il veut, il crie ou pleure. Face au « non » du parent, il n’est pas content. Cependant il apprend qu’on ne peut tout faire ni tout avoir tout de suite. Si on lui cède tout, il se sentira dépourvu, malheureux, en colère lorsqu’il n’aura pas ce qu’il souhaite ; il ne saura pas gérer la frustration.
De plus, le petit enfant se croit tout-puissant : il pense qu’il crée les objets qu’il désire ou dont il a besoin. Cette illusion de toute-puissance, bénéfique au début de la vie, doit disparaître peu à peu. Les parents aident l’enfant à comprendre cela et l’enfant en est rassuré. Car cette toute-puissante est à la fois grisante et angoissante. En effet, s’il peut tout, cela signifie que ses pensées ou sentiments de haine peuvent avoir un effet destructeur sur les objets. Ce pouvoir est terrifiant pour lui et le conduit à des sentiments de grande culpabilité. Apprendre à renoncer fait partie de la construction de la personnalité. Peu à peu les limites sont intériorisées. L’enfant de la période de latence (6-10 ans) les connaît et a rarement besoin qu’on les lui rappelle. Puis vient l’adolescence, et la question des limites semble relancée. En même temps qu’il subit ces changements corporels et psychologiques, l’adolescent remet en question ce qu’on lui a imposé jusqu’ici. Il se sent plus fort, plus à même de comprendre, et sa pensée s’autonomise.
C’est en déconstruisant le modèle que ses parents lui proposent qu’il va construire sa personnalité. Il se peut qu’il revienne fidèlement au modèle parental après l’adolescence mais, pour l’heure, il a besoin de le remettre en question. Au fond de lui il ne souhaite pas que les règles soient toutes abolies, mais a besoin qu’elles évoluent. C’est pourquoi ce sont à la fois les parents et l’adolescent qui doivent se mettre d’accord sur de nouvelles limites. La part de responsabilité qu’il prend dans la création des règles de vie l’engage à les respecter. Toutefois ce n’est pas à lui de les poser entièrement. Car s’il ne les respecte pas, il se sentira dévalorisé. Il a besoin de cet appui contre quelque chose. La règle est donc avant tout celle des parents et il y participe.